Une simple éclaboussure s’est transformée en affaire d’État. Après un jet de peinture sur le portail de Matignon, deux militantes écologistes se retrouvent face à une facture vertigineuse. Ce différend oppose symboliquement engagement militant et pouvoir public. Entre coût affiché, responsabilité et image politique, l’affaire questionne bien plus qu’un simple portail sali.
Addition contestée après un jet de peinture à Matignon
Le secrétariat général du gouvernement réclame 163 654,85 euros aux activistes, affirme liberation.fr. L’addition dépasserait d’environ 150 000 euros le coût réel des travaux, selon la défense. La demande n’inclurait pas seulement le nettoyage du portail. Elle financerait aussi une rénovation plus large, présentée comme nécessaire sur un monument classé.
Des professionnels rappellent que le nettoyage classique coûte au plus 50 euros par mètre carré. Pour un bâtiment patrimonial, un architecte des Bâtiments de France s’impose, avec un budget proche de 10 000 euros. Dépasser 100 000 euros paraît invraisemblable, sauf sinistre majeur; l’hôtel est classé depuis 1923.
Le jour des faits, deux extincteurs contenaient une acrylique orange. Le collectif dit utiliser une peinture à l’eau. Selon une prévenue, la majorité du liquide s’est répandue au sol. La porte a été à peine touchée par le jet de peinture, malgré l’intervention rapide des militaires.
Un jet de peinture, des documents et des dates qui surprennent
Un devis estampillé Matignon, daté du 20 mars 2024, chiffre 158 668,85 euros. Le document additionne nettoyage, taille de pierre, entretien de sculptures, échafaudages et clôture de chantier. L’opération relève d’un marché public d’entretien général, selon une source. Elle ne découlerait pas uniquement de l’action menée devant le portail.
Deux bons de commande intriguent. Le premier, chiffré 2 682 euros en février 2023, concerne un service d’élimination rapide de peinture. Le second, daté du même mois pour 2 304 euros, vise une analyse détaillée du produit utilisé. L’action de novembre 2023 est postérieure.
Les dommages et intérêts ont été réclamés le 25 juin. Le 23 septembre, l’une des prévenues, 23 ans, a reçu six mois fermes pour le jet de peinture. L’infraction retient aussi des « violences » pour des éclaboussures. Elle a fait appel, tandis que l’autre a écopé de huit mois avec sursis. Le chiffrage est renvoyé à la chambre civile, audience en octobre 2026.
Précédents judiciaires, débat sur la proportion et la dissuasion
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À l’audience, l’État a reconnu que la demande couvre d’autres dégradations liées à des actions antérieures. La défense rappelle un principe clair du droit pénal. On ne répare que les dommages causés par l’infraction poursuivie, pas des atteintes voisines, même répétées en amont.
Un précédent existe à Lyon. Le 19 décembre 2023, trois militants ont dû payer 76 000 euros après un jet de peinture. L’action visait la préfecture du Rhône. La sanction interroge l’outil des autorités, car la frontière entre réparation et pression reste délicate.
À Nantes, la métropole réclamait 8 200 euros pour nettoyer la préfecture. En avril 2024, elle a finalement demandé un euro symbolique. Une membre du Mouvement de soutien aux défenseurs de l’environnement y voit une dissuasion financière croissante. Les prévenues disposent, selon elle, de moyens limités.
Ce litige chiffré testera les limites de la réparation
Au-delà des émotions, la prochaine étape se jouera sur le terrain du droit, des marchés publics et de la proportion. Le juge civil devra démêler ce qui relève d’un entretien programmé et ce qui découle d’un jet de peinture. Le rendez-vous d’octobre 2026 fixera un cap, tandis que les appels préciseront la doctrine. La décision pèsera sur les prochains arbitrages autour des actions militantes.